Article parut dans le Magazine Avantages (juin 2016, version papier) et replay video de mon intervention TV sur la Lactofermentation et ses bienfaits pour la santé et notre flore intestinale.
Le point commun entre la choucroute, les cornichons, la sauce soja et les yaourts ? Ce sont des aliments fermentés. Ils ont la cote et plein de bienfaits santé, notamment côté digestion.
Pour transformer le jus de raisin en vin, le lait en fromage, le soja en tofu, le chou en choucroute… on utilise la fermentation. Autrement dit, on les laisse macérer, généralement en l’absence d’air et parfois avec du sel. Au cours du processus, des micro-organismes prolifèrent et tuent les toxines et mauvaises bactéries : on peut alors garder l’aliment plusieurs mois, voire plusieurs années, sans ajouter quoi que ce soit. Un procédé qui risque bientôt de ne plus avoir de secret pour nous grâce au flot de livres qui débarquent en librairie pour nous expliquer pourquoi ils nous font du bien et comment les maîtriser : « L’art de la fermentation » (La Plage), « Précis de fermentation » (Marabout), « Ces ferments qui nous veulent du bien : petit manuel de lacto-fermentation (Rouergue), « Aliments fermentés » (Larousse)… Un véritable retour en force pour ce mode de conservation très en vogue chez nos ancêtres du paléolitique. On peut d’ailleurs parier qu’ils avaient moins de soucis de digestion que nous. Voilà pourquoi.
La lactofermentation comment faire
La fermentation enrichit les aliments
Avec la fermentation, pas de cuisson, les aliments restent « vivants » et leur valeur nutritive augmente au cours du processus : on y gagne en vitamines, en minéraux et en oligo-éléments. Un légume fermenté contient par exemple jusqu’à 10 fois plus de vitamine C que le même légume frais, là où les cuissons traditionnelles ont plutôt tendance à la détruire. Les aliments lacto-fermentés (choucroute, miso, fromages…) sont les plus intéressants côté santé : lors de cette fermentation, le sucre naturellement présent dans un aliment est transformé en acide lactique. Au passage, la quantité de lactobacilles explose. Une bonne nouvelle pour la santé de notre microbiote intestinal !
Des « probiotiques » naturels
La flore de nos intestins est en effet essentiellement composée de bactéries lactiques. Quand les mauvaises prennent le pas sur les bonnes, à nous les soucis digestifs type ballonnements, douleurs abdominales, transit qui fait des siennes… Un apport naturel en lactobacilles via les aliments lactofermentés diversifie la flore et aide à conserver l’équilibre, sans avaler des gélules de probiotiques. Autre coup de pouce : les bactéries issues de la fermentation produisent des enzymes qui transforment les grosses molécules en molécules plus petites, plus facilement assimilables. En gros, elles pré-digèrent pour nous ! Le lait est par exemple plus facile à digérer une fois fermenté en yaourt ou en fromage, car les micro-organismes ont déjà digéré une bonne partie du lactose, les légumes fermentés sont généralement moins irritants que crudités, le pain au (vrai) levain mieux toléré que pain blanc, etc. Pas une solution miracle si on a les intestins détraqués, mais de bons alliés au quotidien.
On mise sur la choucroute
C’est la star des aliments fermentés : 100 g apporteraient plus de lactobacilles que des dizaines de gélules de probiotiques. On n’en mange souvent qu’une fois par an, avec de la saucisse… alors qu’il existe d’autres façons de la consommer. Il est d’ailleurs préférable de consommer la choucroute crue (faite maison ou achetée en boutique bio) pour faire le plein de nutriments. Les adeptes en avalent 1 à 2 cuillères à soupe le matin au réveil… mais elle peut aussi faire une très bonne entrée et se mêle bien aux salades, au chou vert râpé, aux pommes râpées crues, aux noix, aux carottes râpées. Attention si on ballonne beaucoup : elle risque parfois, comme tous les légumes fermentés, d’aggraver les choses à cause des fibres qui peuvent être difficiles à digérer. Mieux vaut y aller doucement au départ en cas d’intestins sensibles. On avale de petites quantités, on mâche bien (pour casser les fibres) et si ça ne passe vraiment pas, on découvre plutôt le chou et les autres légumes fermentés sous forme de jus. On peut ajouter par exemple un peu de jus de choucroute dans un jus de carottes maison à l’extracteur.
On varie les plaisirs
Comme les aliments fermentés sont bénéfiques à de très petites doses, pas besoin d’en faire le cœur de notre alimentation (d’autant plus qu’ils sont souvent assez salés), juste de les ajouter par-ci par-là, en diversifiant les sources. Côté légumes, on peut faire fermenter des cornichons, olives, câpres, oignons, choux-fleurs, haricots… en pickles à servir en apéritif ou à ajouter dans une salade. On pense aussi aux condiments en variant les vinaigres dans nos sauces salades ou en accompagnant notre fromage d’un chutney de mangue ou de tomates à l’indienne. Au resto, on commande des feuilles de vignes ou une soupe miso (à base de pâte fermentée de soja), on accompagne nos sushis de sauce soja ou on trempe nos nems dans la sauce nuoc-mâm. On peut terminer de temps en temps notre repas par un morceau de fromage au lait cru non pasteurisé (type camembert, gruyère, roquefort… avec la croûte de préférence) sur une tranche de pain au levain, ou un yaourt. Les adeptes des boissons exotiques essayeront le kéfir (à partir de lait ou de fruits fermentés) ou le kombucha (une boisson chaude à base de thé vert ou noir et de sucres). On trouve aussi dans les magasins bio (type La Vie claire) de plus en plus de jus lacto-fermentés (carotte, betterave, grenade…) et de bocaux type carottes ou tomates fermentés. Leur goût est juste un peu plus acide que l’équivalent cru.
On fait fermenter nos légumes à la maison
Gare au piège : des cornichons industriels conservés dans du vinaigre sans lacto-fermentation préalable n’ont pas le même intérêt pour la santé. Voilà pourquoi il vaut mieux faire soi-même ses bocaux de pickles de légumes. Rien de compliqué : il nous faut des bocaux en verre à fermeture avec un joint caoutchouc (propres, mais pas besoin de les stériliser), des légumes frais, du gros sel de mer et de l’eau. La recette pour un bocal de 50 cl : plonger les légumes lavés et épluchés dans le bocal, ajouter 25 cl de saumure (mélanger 30 g de gros sel marin dans 1 litre d’eau, attendre que le sel soit complètement fondu) en veillant à bien recouvrir les légumes et à remplir jusqu’à 2 cm sous l’ouverture, pas plus haut. Fermer hermétiquement. Dans les jours qui suivent, un dépôt grisâtre se forme au fond du bocal et le liquide devient effervescent. C’est prêt à être mangé au bout de 15 jours environ, mais on peut les garder plus d’un an. A essayer pour le chou et les cornichons mais aussi les haricots verts, les carottes, les poivrons, les tomates, les courgettes, les aubergines, les concombres, les navets, les radis, le céleri… et aussi des fruits (melon, cerises, pommes et poires, citrons confits comme au Maghreb). Contrairement à la mise en conserve, pas de risque lié à de mauvaises bactéries : si la fermentation est ratée (par exemple parce qu’il y a eu de l’air), ça se voit tout de suite et on n’aura même pas envie de manger l’aliment…
On lit – Pour tout savoir et préparer nos propres plats et accompagnements à base d’aliments fermentés (légumes mais aussi viandes et poissons, céréales, laitages et boissons), on pioche plein de recettes dans les deux livres écrits par la journaliste et historienne culinaire Marie-Claire Frédéric : « Je mange des aliments fermentés, et ça me fait du bien » (Marabout) et « Aliments fermentés, aliments santé: Méthodes, conseils et recettes » (Ed. Alternatives), ce dernier proposant uniquement des recettes végétariennes.
Encadré – Les autres vertus des aliments fermentés
Il y a d’autres bonnes raisons de remettre les aliments fermentés au menu. Des études montrent leurs bienfaits sur l’immunité, sans doute grâce à l’acide lactique qui s’oppose au développement des bactéries et des virus ainsi qu’à la richesse de ces aliments en vitamine C. Un bon point par exemple pour se prémunir des gastro. Ils semblent aussi protéger contre la dépression : des chercheurs ont soumis à 710 étudiants un questionnaire évaluant leurs apports en aliments fermentés, et ceux qui en consomment le plus sont aussi ceux qui souffrent moins d’anxiété sociale. Pas si étonnant puisqu’on connaît désormais le lien étroit entre notre microbiote et notre cerveau.
Merci à Marion Kaplan, nutritionniste, auteur du livre « Paléobiotique » aux éditions Thierry Souccar et à Isabelle Schillig, naturopathe à Grenoble Uriage (https://naturopathe-uriage.fr/).
Article écrit par la journaliste Laura Chatelain
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